Textes

GERARD SENDREY IN “REVUE IMAGO”

L'album des souvenirs errants

On remarque de façon quasi permanente dans l’œuvre de Chris Besser une présence simultanée humaine et animale, l’une et l’autre à reconstituer, parfois après plusieurs lectures de la composition, tant les formes sont peu conventionnelles et relèvent d’un imaginaire débridé faisant belle alliance avec une grande force créatrice. Cette iconographie parfaitement originale sollicite le regard pour l’inciter à se perdre dans un univers magique marqué de mystérieuses références. On entre dans l’univers de Chris Besser comme on voudrait aller au fond du kaléidoscope pour prendre connaissance de l’organisation interne de l’image. Pourtant elle nous prive de toute initiative et impose sa construction, précise et mesurée, dans un apparent désordre et l’œil ne peut que suivre les sinuosités de ces parcours étranges décrivant des scènes surgies d’un ailleurs que l’on visite avec l’émerveillement enfantin de qui se retrouve en présence de visions primitives illuminées par des soleils secrets.

FRÉDÉRIQUE GRUYER

Conte d’une planète en sable de la mer, couleur de nuit, celle de Chris Besser.
Un monde de lutins, d’animaux tutélaires y vit, gardien du peuple de l’enfance.
De loin, bien loin, du giron étoilé de la terre, son peuple s’est mis en marche.
Enfin libre, l’enfant vient à vous.

JEAN-CLAUDE CAIRE

IN LES AMIS DE FRANÇOIS OZENDA

Lorsqu’on s’approche des peintures de Chris Besser, il faut faire attention, car toutes ces grosses bêtes au regard sournois et quelquefois à la babine retroussée risquent de mordre le spectateur juste derrière le cou et l’emporter dans le tréfonds de la nuit. Mais que l’on se rassure, dans chaque tableau veille, une fée, un prince, ou des personnages magiques, gardiens des formidables énergies accumulées par ses étranges animaux rougeoyants, qui au début de leur existence, avant d’être soumis à d’alchimiques mutations, furent certainement chien, loup, chat, vache, lapin.
Chris Besser raconte des histoires émergeant du fond la mémoire, des dédales du cerveau. Venues du temps passé, ses images affleurent tout simplement dans le présent, comme l’eau de la source coule à l’air libre après un interminable parcours solitaire et souterrain. Elle retrouve le droit fil du conte, dans tout ce qu’il contient de merveilleux et de symbolique. Les enfants, eux, ne s’y trompent pas, ils les écoutent toujours avec le même ravissement depuis des millénaires, car ils illuminent les multiples facettes de l’imaginaire. Ses compositions naissent de façon spontanée, ce qui fait que souvent elle découvre certains éléments dans ses toiles de façon inopinée, ils se sont imposés sans autre forme de procès. Il faut dire qu’à force d’interroger l’inconnu, on finit par avoir des surprises. Et souvent dans l’art hors les normes, c’est la création qui impose son discours et non plus le créateur. Dernièrement Chris Besser a représenté une série d’œuvres intitulées “Splendor Vitae”. (…)
À regarder longtemps ses œuvres, on risque peu à peu de plonger dans les splendeurs de cet inconnu infini sur lequel nous flottons une vie durant, sans jamais rien comprendre.
Si certaines de ses bêtes, dans cette exposition, paraissent, à première vue, peu recommandables pour le visiteur, il faut dire qu’on leur reconnaît davantage un rôle protecteur, ami, comme si la gent animale et humaine se retrouvaient étroitement associées pour faire face aux incertitudes de l’avenir, qui se reflètent dans le regard bleu lagon de ses personnages. Elle travaille de façon intense la matière de ses tableaux, elle la sculpte presque plan par plan, donnant à la pâte un relief qui pourrait suffire à lui seul, à assurer la lisibilité de l’histoire qu’elle raconte, sans même l’ajout des pigments colorés. Bien que son œuvre reste spontanée, directe, fortement inventive, cela ne l’empêche pas de poursuivre une recherche continue, ne serait-ce que sur le plan technique. L’essentiel reste qu’il existe chez Chris Besser la nécessité d’exprimer des pulsions créatrices urgentes et que pour y parvenir elle se doit d’expérimenter et de trouver ses propres recettes. De tout façon, une œuvre d’art existe par le choc qu’elle nous procure et toute la succession de réactions que cela entraîne. Après, toutes les analyses ne sont qu’exercices narcissiques pour l’amateur. Regardez bien au fond des yeux des personnages. Oubliez tout ce qui se passe autour. Alors vous vous apercevrez que de tels regards, on en rencontre presque exclusivement qu’à Bègles. Allez savoir pourquoi?